

130 x 97 cm., A/t., 2008

130 x 97 cm., A/t., 2008.

130 x 97 cm., A/t., 2008
Substrat N° 10
N°10-"Test", 2008, acrylique sur toile, 130 x 97 cm.
« Au royaume des cyclopes, les borgnes sont aveugles. » Philippe Geluck (1).
N°10- Le temps des cerises, c’est chouette !
La peinture intitulée "Test" figure trois hommes qui viennent de subir un test d’évaluation d’intelligence. En bas à gauche de la composition, est peinte une paillasse de laboratoire blanche sur laquelle sont alignées cinq coupelles remplies chacune de gélules de couleurs différentes, soit de gauche à droite: orange, rouge, vert, jaune, bleu. Ces gélules sont constituées d’une enveloppe colorée et contiennent chacune selon leur couleur, un principe actif différent.
Cinq étiquettes annotées d’écritures manuscrites équipées d’un lien en fibres synthétiques, accompagnent chacune des coupelles. A gauche l’homme à lunette, petite moustache et chemise à petits carreaux noirs et blancs, observe une gélule rouge qu’il tient entre le pouce et l’index de sa main droite; au centre l’homme brun à la barbe en collier et à la chemise en jean, regarde la gélule rouge tenue par son voisin de droite et tient entre le pouce et le majeur de sa main droite, l’étiquette de la coupelle remplie de gélules vertes; à droite l’homme de profil regarde également cette gélule rouge tenue par le personnage de gauche. Le test consiste à goûter chaque gélule de couleur pour y découvrir le goût spécifique de la cerise.
Les 3 candidats à l’épreuve devaient montrer dans quelle gélule de couleur ils avaient trouvé la saveur de cerise et retourner l’étiquette de chaque coupelle pour en lire l’appellation. Seules les gélules rouges contenaient une reconstitution chimique du goût de la cerise alors que les autres gélules de couleurs différentes contenaient des saveurs d’autres fruits. Le gagnant est l’homme de gauche, alors que l’homme du centre avait reconnu le goût de la cerise dans une gélule verte, contenant un ersatz de grenade et celui de droite dans une gélule bleu contenant un substitut à la saveur de myrtille. Le résultat de l’évaluation est donc négatif puisqu’une personne testée sur trois à l’aptitude à reconnaître le goût de la cerise.
En arrière plan l’image étirée en hauteur d’une affiche bucolique représentant une jeune femme allongée sur le ventre dans l’herbe. Elle arbore un large sourire et nous présente, tenues par la queue de succulentes cerises.
Le cerisier doit avoir pour ancêtre le merisier sauvage et se reproduisait par le noyau que contient chaque cerise. Celui-ci tombait en bas de l’arbre ou était mangé par certains oiseaux et l’homme: enfin il était rejeté dans les excréments, plus loin dans la terre ou la graine donnait naissance à un germe de cerisier à la bonne saison, dès qu’il était suffisamment arrosé par une pluie suffisante. L’homme observa longuement ce phénomène de germination dans un milieu fort en matière organique, terre et eau avant que les cultivateurs puissent le domestiquer. Pendant des millénaires, l’homme en sélectionnant les graines des fruits les plus gros et les plus sucrés, les plus précoces ou les plus succulents cultiva le cerisier en plantation. Ainsi évolua le fruit pour devenir ce qu’il est aujourd’hui. Les cerises renvoient à la douceur sucrée de l’été, et donc à un contexte joyeux et festif, une certaine gaieté populaire dont on peut avoir la nostalgie. Elles rappellent également, par leur couleur, le sang et le drapeau rouge liés à la Commune et demeurent associées à l’idée de liberté de solidarité, et de résistance face à l’oppression.
"Le temps des cerises" de 1866, les paroles sont de Jean-Baptiste Clément (1836-1903) (2) et la musique d’Antoine Renard (1825-1872) :
« Quand nous chanterons le temps des cerises
Et gai rossignol et merle moqueur
Seront tous en fête …
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au cœur
Quand nous chanterons le temps des cerises
Sifflera bien mieux le merle moqueur
Mais il est bien court le temps des cerises
Où l’on s’en va deux cueillir en rêvant
Des pendants d’oreille …
Cerises d’amour aux robes pareilles
Tombant sur la feuille en gouttes de sang
Mais il est bien court le temps des cerises
Pendants de corail qu’on cueille en rêvant
Quand vous en serez au temps des cerises
Si vous avez peur des chagrins d’amour
Evitez les belles …
Moi qui ne crains pas les peines cruelles
Je ne vivrai point sans souffrir un jour
Quand vous en serez au temps des cerises
Vous aurez aussi vos peines d’amour
J’aimerai toujours le temps des cerises
C’est de ce temps-là que je garde au cœur
Une plaie ouverte …
Et Dame Fortune, en m’étant offerte
Ne pourra jamais fermer ma douleur
J’aimerai toujours le temps des cerises
Et le souvenir que je garde au cœur. »
Sans jeu de mot, c’est vraiment "chouette" qu’il y ai des cerises dans cette œuvre “test”, mais il s’y trouve également dans l’angle à droite une monnaie frappée aux effigies de l’ancienne Athènes. Une pièce grecque en alliage de bronze qui porte comme empreinte la Chouette accompagnée de quelques lettres grecques et d’un brin de laurier. C’est le grand symbole du monde antique, il est lié à Athéna, Déesse de la Grèce des Arts et de la sagesse, de la guerre défensive, Athéna prête son symbole ailé à la ville d’Athènes, qui frappe monnaie à l’effigie de cet étrange oiseau de nuit.
Le "Ciel étoilé", prévient Zeus qu’un fils né de Métis lui prendrait son trône. Par conséquent, dès qu’il apprend que Métis est enceinte, Zeus prend le parti de l’avaler. Mais quelques mois plus tard, il ressent de terribles maux de tête sur les bords du lac Triton. Il demande alors à Héphaïstos, dieu du feu, des forges et des volcans, de lui ouvrir le crâne d’un coup de hache, pour le libérer de ce mal : c’est ainsi qu’Athéna jaillit, brandissant sa lance et son bouclier, de la tête de Zeus, en poussant un puissant cri de guerre. Par la suite, Athéna sera considérée comme la fille de Zeus seul : « Je n’ai pas eu de mère pour me donner la vie. » fait dire à Athéna, Eschyle dans les "Euménides"(3).
Le croissant de lune sur la pièce est lié à l'intelligente d'Athéna, il indique qu'il s'agit d'un vrai Pharmakon (4) tout à la fois un remède, un poison, et un bouc-émissaire, ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue.
Jean-Bernard Pouchous - 2010.
N°10-Bibliographie :
N°10-1- Philippe Geluck, Geluck se lâche!, éd. Casterman, 2009.
N°10-2- Georges Renauld, Jean-Baptiste Clément, éd. Detrad aVs, coll. Les Francs-Maçons méconnus, 2005.
N°10-3- Eschyle, trad. Daniel Loayza, L’Orestie : Agamemnon - Les Choéphores - Les Euménides, éd. Flammarion, coll. Garnier Théâtre étranger, 2001.
N°10-4-Bernard Stiegler, Ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue - de la phamacologie, éd. Flammarion, coll. Biblbliothèque des savoirs, 2010.