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Substrat - N° 13

N°13-"Quadrature", 2016, acrylique sur toile, 162 x 130 cm.

« Quelle est la différence entre la théorie et la pratique ? »

« La théorie, c’est quand on sait tout et que rien ne fonctionne. La pratique, c’est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi. Mais ici, nous avons réuni théorie et pratique : rien ne fonctionne et personne ne sait pourquoi. » Albert Einstein (1879-1955)

 

N°13- Travail.

La peinture intitulée " Quadrature " représente une ouvrière travaillant sur une machine outil. Il s’agit d’une fraiseuse manuelle horizontale commandée par une ajusteur/tourneur/fraiseur permettant l’usinage de pièce métallique industrielle. La fraise munie de dents est mise en rotation et taille la matière grâce à sa rotation et au mouvement de la fraise par rapport à la pièce. La forme de la fraise est variable ; elle peut être cylindrique, torique, conique, hémisphérique… La fraise et la pièce sont montées sur des glissières et peuvent se déplacer suivant des coordonnées X , Y ou Z.

L’ouvrière est vêtue d’une salopette  beige à bretelles, d’une chemise à manche courte bleu et d’une casquette à visière jaune. Elle tourne, des deux mains, le volant du chariot horizontal de la fraiseuse pour rapprocher la pièce à travailler vers le tour. Son visage de profil est orienté vers l’ouvrage et montre une grande concentration.

Cette ouvrière n’est que Jean-Bernard Pouchous lui-même alors âgé alors de 55 ans. Il s’est métamorphosé en ajusteur/tourneur/fraiseur de pièces mécaniques de précisons. Cet autoportrait, outre, la maîtrise de la géométrie de l’objet métallique à fabriquer, implique un domaine de compétence où les tolérances techniques acceptables se doivent être minimales. Une sorte de compromis entre la précision requise pour un fonctionnement satisfaisant et les contraintes techniques et économiques de la fabrication. Un travail féminin qui fascine le peintre et le plasticien qui se représente en travailleur, quelqu’un qui a « les mains dans le cambouis ».

Dans la "Pax Americana", qui mène la danse ? (1) Nous imaginons la CIA durant la Guerre froide culturelle prenant Jean-Bernard Pouchous en otage dans une usine d’armement. Une bataille intellectuelle dont le programme serait de combattre et de limiter la contagion communiste en Europe occidentale et de promouvoir le mode de vie américain, aussi bien politique, socio-économique qu'artistique. Les services secrets du vainqueur auraient porté l'art de mentir à de nouvelles hauteurs comme avec la montée au pinacle de l'expressionnisme abstrait de Jackson Pollock qui était fortement subventionné parce qu'il n'avait rien à dire face à Guernica?

L’usine métallurgique dans lequel travaille l’artiste d’un autre genre, enferme un univers de formes circulaires, rondes,  sphériques… Il a les boules !

Nous somme à l’intérieur d’une tour aéroréfrigérante ou TAR, aussi appelées tour de refroidissement, qui est utilisée pour refroidir des vapeurs d’eau en ébullition, à l'aide de l'air ambiant. Les  centrales nucléaires en sont équipées dans les sites industriels destinés à la production d’électricité. Ceux-ci utilisent comme chaudière(s) un ou plusieurs réacteurs alimentés en combustible nucléaire. L'énergie d'une centrale nucléaire provient de la fission de noyaux d'atomes lourds. L'énergie dégagée par la fission dégage de la chaleur qui sert à vaporiser de l'eau. La vapeur d'eau produite entraîne ensuite en rotation une turbine accouplée à un alternateur qui produit à son tour de l'électricité.

Au sommet de la perspective hyperboloïde du TAR, apparaît une gigantesque tête de chouette. L’animal nous regarde fixement, fasciné, écarquillant deux grands yeux noirs cerné de jaune, comme deux billes de verre.

En pendant, au même niveau et à gauche des yeux de l’oiseau de nuit, deux boulles sont immobilisées dans l’espace. La Terre et la Lune, nous regardent droit dans les yeux, comme la chouette. Là, les proportions ne sont pas respectées, la Terre et la Lune ne peuvent se réunir dans la tour de refroidissement d’une centrale nucléaire et leur promiscuité surprend car la distance entre les deux astres est de 384.402 km., bien que le diamètre de la Lune soit bien représenté comme quatre fois plus petit que celui de la Terre.

La forme de la Terre n’est pas parfaitement sphérique, elle s’approche plus d’un ellipsoïde, une sphère aplatie aux pôles. La rotation de la Terre entraine l'apparition d'un léger bourrelet de sorte que le diamètre à l’équateur est 43 kilomètres plus long que le diamètre polaire (du pôle Nord au pôle Sud).

La Lune a une influence curieuse sur la Terre comme les marées. Le mouvement de révolution de la Lune autour de la Terre induit un effet gravitationnel différentiel sur les eaux qui constituent les océans et les mers, provoquant une hausse locale du niveau d’eau à la surface de la Terre, approximativement dans la direction Terre-Lune, et dans la direction opposée. L’activité sismique serait aussi influencée ; le magma du manteau, présent sous la croûte terrestre solide, subirait lui aussi du fait de son état visqueux des mouvements, correspondant au passage du satellite. 

Ce sont un peu comme deux yeux dissemblables, le petit louchant sur le plus grand comme dans le cas de diplopie ou double vision ou perception simultanée de deux images d'un même objet. Notre vision stéréoscopique permet une appréciation précise des distances. En effet, la vision binoculaire est normalement accompagnée de la fusion par le cerveau des deux images perçues par les yeux en une seule ce qui permet d'avoir conscience des distances. Vue de l’espace la Terre et la Lune regarderaient l’infini comme deux jumeaux dizygotes, comme deux cercles dissemblables qui font peut-être référence à la dualité propre à l’être humain.

« Tout le monde est un génie. Mais si vous jugez un poisson sur sa capacité à grimper à un arbre, il va passer toute sa vie à penser qu’il est stupide. » Albert Einstein.

En bas à droite du tableau est représenté comme sur un écran ACL (Affichage à Cristaux Liquide) le screenshot d’un poisson Diodon, souvent appelées "poissons-hérissons", "poissons porc-épic" ou encore "hérisson des mers" dans son milieu naturel, l’eau. Lorsqu'il se sent en danger, le diodon se gonfle très rapidement pour effrayer son agresseur. Il accumule de l’air ou de l’eau dans son œsophage jusqu'à prendre une forme sphérique. Le Diodon effrayé accumule une toxine qu’il concentre dans la pointe de ses piquants, ce poison est donc une arme supplémentaire contre d'éventuels prédateurs.

Jean-Bernard Pouchous tente par cette œuvre peinte de résoudre un problème insoluble , un problème épineux,  impossible à résoudre, comme chercher la "quadrature du cercle" (2), cette absurdité qui consistait à vouloir construire à l’aide d’une règle et d’un compas un carré de même aire qu'un disque donné. Le peintre tourne en rond autour de son sujet, il en perd la boulle, roulant les yeux comme deux planètes que leur interaction gravitationnelle fait orbiter autour d'un centre de masse commun nettement distinct de chacun d'eux, comme dans un cercle qui se voudrait aussi vertueux que vicieux.

Jean-Bernard Pouchous, 2017.

N°13-Bibliographie :

N°13-1. France Stonor Saunders, Qui mène la danse ? La CIA et la Guerre froide culturelle, éd. Denoel, coll. Impacts, 2003.

N°13-2. André Krop, La Quadrature du cercle et le nombre Pi, éd. Ellipses Marketing, coll. L’Esprit des Sciences, 2005.

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