

195 x 97 cm., A/t., 2007

195 x 97 cm., A/t., 2007

195 x 97 cm., A/t., 2007
Substrat - N° 5
N°5-"10 Ans", 2007, acrylique sur toile, 195 x 97 cm.
« On veut que le pauvre soit sans défaut. » Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (1732-1799) (1).
N°5- Alerte.
Le décor de cette peinture intitulée "10 Ans", est un entrepôt où sont stockés des réfrigérateurs. Leurs emballages ont été ouverts pour vérification "qualité". L’un d’eux, au premier plan attire un jeune garçon qui ne partage pas notre point de vue. Il se soulève sur la pointe des pieds pour en vérifier un contenu garanti 10 ans. Une ouverture de côté lui permet de se rendre compte de la réalité anatomique en "chair et en os" de la chose. A l’intérieur, une belle emballée nue se marre en nous désignant le gamin du pouce.
Ainsi, le jeu, qui est une vraie création du monde par l’enfant, s’oppose au jouet, qui selon Piaget, ne serait que «...la récupération publicitaire de ce qui, précisément, était laissé à l’imagination et à la liberté de l’enfant. »
« Sois un grand mon petit! »
Contenir deux demandes qui s’opposent, comment faire ? En famille, les parents exigent souvent, chacun un lien exclusif de la part de leur enfant, ce qui soumet l’enfant à deux "demandes oppressantes" qui se contrarient souvent.
« Tu ressembles à ton père! T’es comme ta mère! Je croirais entendre ton père! Telle mère, telle fille!»
Comment être soi-même dans ce contexte parental et sexué déchirant, doit-on choisir au risque de se noyer dans le désir de l’autre.
« La peur chez soi, la peur des siens! Parents-enfants, attention!
Quel est l’objet ? Péril en la demeure ! »
Jacques Van Rillaer est psychologue spécialiste de thérapies cognitivo-comportementales, connu pour avoir critiqué l’oeuvre de Sigmund Freud, il nous précise dans son recueil "Peur, Angoisses et Phobies" (2), ce qu’est "la réaction d’alerte et la peur" :
« Tout stimulus perçu comme menaçant ou frustrant tend à provoquer une réaction d’alerte, une mobilisation immédiate de ressources physiologiques et psychologiques, qui permet d’agir de façon énergique, en particulier pour attaquer ou pour fuir (fight or flight reaction). Selon les circonstances, cette réaction peut être vécue comme une simple tension, une irritation, une inquiétude, une réaction de peur ou d’anxiété. La peur est une réaction affective provoquée par la perception d’un danger. Le facteur déclenchant est l’interprétation que fait la personne de la situation, plutôt que la réalité objective du danger.. La peur est ressentie d’ordinaire comme pénible. Elle s’accompagne d’une activation plus ou moins intense des systèmes nerveux, cardio-vasculaires et respiratoires, préparant à l’action. Elle suscite une polarisation de l’attention et une impulsion à agir en vue de supprimer la cause de souffrance ou de s’en éloigner. Si le combat ou la fuite paraissent voués à l’échec, l’individu peut se sentir paralysé (figement postural). Cette réaction est peu fréquente chez l’homme. Elle est automatique chez certains animaux et leur permet d’échapper à l’attention de prédateurs sensibles avant tout aux mouvements des proies. La peur, comme d’autres réactions affectives (par exemple la colère, la tristesse ou la joie), apparaît chez les nourrissons et chez des animaux. Elle est un mécanisme mis en place au cours de l’évolution de l’espèce humaine et qui subsiste parce qu’il favorise l’adaptation et la survie. La tonalité pénible de la peur motive l’individu à être vigilant et à agir pour changer la situation. Les humains sont génétiquement programmés pour éprouver de la peur. Ils ne redoutent pas tous les mêmes situations. Chez certains, les réactions d’alerte ou de peur apparaissent rarement et restent relativement faibles. Chez d’autres, ces réactions sont déclenchées à contretemps et avec une intensité néfaste. les peurs varient selon les âges et selon les environnements. La peur du vide apparaît chez la plupart des enfants vers 9 mois (l’âge auquel l’enfant commence à se déplacer)., la peur des animaux est la plus fréquente entre deux et quatre ans, la peur du ridicule ne se développe qu’à partir de deux ou trois ans. Suivant les régions, beaucoup ou peu d’individus redoutent de se découvrir un jour homosexuels, d’être punis par Dieu ou de se trouver enterrés sous des décombres provoqués par un tremblement de terre. Des analyses statistiques sur les craintes les plus fréquentes dans le monde occidental permettent de ramener une large partie d’entre elles à trois peurs fondamentales: la peur de la douleur (des blessures et des maladies); la peur de l’anxiété et de ses conséquences (perdre le contrôle de soi); la peur d’être jugé négativement. »
C’est l’anthropologue Paul Radin (1883-1959) (3) qui a rendu célèbre le "Trickster" (farceur), curieux personnage mythique présent dans toutes les cultures comme "Fripon divin". Il fait des tours pendables, possède une activité désordonnée incessante, une sexualité débordante, il est une sorte de miroir de l’esprit, un "speculum mentis". Ce qui inspira Carl Gustav Young (1875-1961) (4) au développement du concept "d’enfant intérieur". Avec un nom pareil cet homme de science a été généreux en nous rappellant qu’ : « Il y a peu de mythes dont nous puissions affirmer avec autant d’assurance qu’ils appartiennent aux plus anciens modes d’expression de l’humanité. »
Enfant éternel, "puer aeternus", la part enfantine est présent dans chaque être, quelle que soit sa culture et ses idées ou croyances. Il faut croire le "Fripon divin", entre foi et mauvaise foi pas un interstice de doute comme entre noir et blanc aucune nuance, argumentum ad ignorantiam ou zézétique ?
« La foi soulève des montagnes, oui : des montagnes d'absurdités. » André Gide (1869-1947).
Jean-Bernard Pouchous - 2008.
N°5-Bibliographie :
N°5-1- Jean-Pierre de Beaumarchais, Beaumarchais : Le voltigeur des lumières, éd. Gallimard, coll. Découvertes, 1996.
N°5-2- Jacques Van Rillaer, Peur - Angoisses et Phobies, éd. Bernet-Danilo, 1998.
N°5-3- Paul Radin, Le Fripon divin: Un mythe indien, éd. Georg, coll. Jung, 1997.
N°5-4- Christian Gaillard, Jung, éd. Presses universitaires de France, coll. Que sais-je ?, 2001.